La cupule double mobilité a été imaginée par G. BOUSQUET en 1976. Elle obéit à un principe tout à fait original et trouve sa place dans la gamme des
prothèses de hanche actuellement présentes sur le marché. Du fait de la qualité des résultats initiaux, avec, en particulier l’absence de luxation précoce, elle connaît actuellement un engouement
particulier. Cependant, ses indications doivent être définies rigoureusement et quoiqu’il paraisse, sa mise en place doit obéir à des règles précises sous peine d’aboutir à des échecs rapides.
Caractéristiques techniques
Dr Jean Pierre LANTUEJOUL
Le système à double mobilité se compose d’une cupule métallique et d’un insert polyéthylène
La cupule originelle est dite tripode, comportant trois points d’ancrages, un constitué par une patte supérieure dans la quelle va se loger une vis de diamètre 4,5, et deux plots inferieurs.
Le système press fit
Les systèmes de reprise
Au vu de l’expérience acquise sur la cupule tripode originelle, on peut retenir un certain nombre de caractéristiques techniques qui doivent être prises en compte :
- La fixation press fit simple peut souvent être obtenue sur une hanche vierge, ne nécessitant pas l’utilisation d’autre système de
fixation En effet, outre les caractéristiques d’un système press fit classique, la cupule dépasse l’hémisphère, et surtout le système à double
mobilité fait disparaître les contraintes de descellement sur la cupule métallique, mais ceci à condition qu’il n’y ait pas de conflit col – cupule.
- L’articulation périphérique (insert – cupule). Cette articulation n’entre en jeu que lorsque des mouvements extrêmes et est donc peu
sollicitée dans l’activité quotidienne. Son bon fonctionnement requiert l’absence d’interposition même de parties molles, et une bonne couverture du polyéthylène par la cupule métallique pour
éviter le fluage. L’existence d’un chanfrein sur le rebord extérieur de l’insert
Elle est indispensable pour que l’articulation centrale (tête – insert) ne soit pas soumise à des contraintes d’usure importantes.
- Si il a été prouvé que l’usure des deux faces de l’implant polyéthylène s’usent peu (Farizon), il est aussi reconnu que l’usure
principale se produit au niveau de la collerette de l’implant polyéthylène (cartier nice). Photo Cette usure est fonction de plusieurs facteurs :
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La qualité du polyéthylène
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La forme de la collerette. Si l’insert polyéthylène avait été conçu au départ avec une collerette cylindrique, il paraît logique d’utiliser
une collerette chanfreinée afin de permettre le débattement du col sans frottement schémas ou photo montrant la différence de conception et la mobilité grâce à la collerette
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La taille et la forme du col. Ce type d’implant doit être utilisé avec
un col de petite taille et suffisamment long pour ne pas permettre de conflit entre polyéthylène et l’embase prothétique schéma
idem
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La rugosité du col. Dans ce type d’implant il existe une articulation entre col et insert polyéthylène. Le col doit donc être traité comme
toutes les autres surfaces articulaires métalliques, c’est à dire poly-brillant et de préférence inox ou chrome cobalt.
Principes technique
La planification pré opératoire.
Etape classique. Mais compte tenu des caractéristiques particulières de la prothèse, il faudra s’assurer de la possibilité d’encastrer convenablement
l’insert dans le cotyle osseux . En effet il faut éviter tant que possible le débord de la cupule métallique sauf en partie supérieure. Si le cotyle osseux est manifestement trop peu profond
pour intégrer de manière satisfaisante la cupule il peut être indiqué de choisir un autre type d’implant. Par contre, l’existence d’une dysplasie du toit ne représente pas une contre indication à
l’utilisation de la cupule double mobilité, à condition d’utiliser alors un système trois points et une greffe du toit qui sera fixée par vissage (deux vis dont la vis de la patte supérieure).
La protrusion de la cupule, si elle peut se discuter sur le plan théorique dans la mesure où elle médialise centre de rotation, n’est pas un obstacle à la stabilité de l’implant, si la fixation
périphérique est correcte.
A l’inverse, lorsqu’il existe une coxarthrose protrusive, il sera logique de prévoir une greffe du fond du cotyle, ce qui permet d’externaliser le centre de rotation. La fixation primaire de la
cupule étant encore une fois périphérique, cette greffe ne contre indique pas la mise à l’appui immédiat.
Dans tous les cas il faut éviter de surdimensionner la cupule par rapport au cotyle osseux, afin d’éviter un trop gros sacrifice osseux, mais aussi
l’inévitable extériorisation des bords antérieurs et postérieurs de la cupule
Photo de radio pré op
L’intervention
La voie d’abord est de principe postéro externe, patient en décubitus latéral.
Après section classique des pelvi-trochantériens, luxation, coupe du col, le fémur et préparé en premier.
La préparation du cotyle requiert en premier lieu une excellente exposition de tout le pourtour qui permettra en particulier de s’assurer de l’absence d’interposition lors de la mise en place des
différents implants
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Les parties molles Les gestes sur la capsule sont fonction d’une éventuelle rétraction, mais ne sont pas systématiques.
Par contre, l’ablation du bourrelet doit être soigneuse, circonférentielle et complétée après le fraisage. Il faut absolument faire disparaître tout résidu qui pourrait s’interposer, soit entre
os et cupule comme classiquement, mais aussi entre cupule et insert, bloquant la mobilité de l’articulation périphérique.
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La préparation osseuse Son objectif est d’atteindre l’os sous chondral sur toute la zone articulaire périphérique pour permettre la
stabilisation primaire de l’implant. Pour permettre un bon positionnement de la cupule, autant en hauteur qu’en antéro postérieur, il est indispensable de retrouver les repères anatomiques que
sont l’arrière fond du cotyle et le bord supérieur du trou obturateur. Souvent la rigidité de la corne postérieure empêche une bonne impaction, et, en particulier en cas de dysplasie
antérieure, elle peut conduire à des fausses routes lors du fraisage. De même la présence d’ostéophytes en os dur au fond du cotyle peut être responsable d’erreur dans le positionnement de la
cupule. Pour ces raisons, il est intéressant de réaliser ‘le tour d’amphithéâtre’ au ciseau frappé, et d’effondrer l’extrémité de la corne postérieure, ce qui permettra, après avoir réséqué le
ligament transverse, souvent calcifié, de repérer le trou obturateur et de guider le trajet des fraises. L’autre solution étant de débuter le fraisage avec une fraise de petit diamètre que l’on
dirige verticalement centrée sur l’arrière fond ; mais le risque n’est pas nul de fraiser trop loin ou de se déporter, trop en avant, voire à l’inverse trop en arrière.
Quant aux ostéophytes périphériques, à l’exception de ceux cités plus haut, il est préférable de ne pas les réséquer au départ, car il peuvent servir de couverture à la cupule métallique
évitant les contacts col prothétique – cupule. Leur résection sera réalisée après mise en place de l’implant définitif, jusqu’au ras de celui-ci.
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Le fraisage proprement dit Il débute une taille ou deux (maximum)en dessous de la taille programmée, selon la dureté osseuse et la profondeur de
fraisage souhaitée : Si l’os est très fragile, ou si l’on souhaite ne pas trop médialiser la cupule, il est préférable de débuter taille pour taille. Le fraisage est réalisé dans l’os sous
chondral du croissant articulaire, jusqu’au ‘freinage’ de la fraise, garant d’un bon press-fit. Idéalement, le fraisage doit s’arreter avant l’arrière fond, tout en permettant un bon
encastrement de la cupule métalliques, en avant et en arrière. Dans le cas où manifestement elle sera en superstructure, il est préférable, si on décide de conserver l’indication de cupule à
double mobilité, de reprendre le fraisage, quitte à traverser la lame quadrilatère, sans risque particulier pour la stabilité de l’implant, mais en acceptant l’inconvénient théorique que peut
représenter une médialisation excessive du centre de rotation. Par contre il faut éviter à tout prix d’augmenter la taille des fraises, ce qui conduirait à sacrifier trop de capital osseux,
tout en augmentant le risque de saillie antérieure ou postérieure de l’implant. Si manifestement on ne peut obtenir un bon press fit, il est préférable de s’orienter vers une cupule tripode que
l’on pourra stabiliser même si les appuis antérieur ou postérieur ne sont pas satisfaisants.
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L’orientation du fraisage doit être celle que l’on veut donner à la cupule définitive.
- Dans le plan frontal, la cupule doit être
horizontalisée. L’orientation par rapport à l’horizontale doit être de 40°, ceci afin de
permettre une bonne couverture de la tête et de l’insert polyéthylène, en particulier dans la zone où les contraintes mécaniques sont maximales. Un défaut de couverture exposerait à une
défaillance de l’implant par fluage et blocage de l’articulation périphérique.
- Dans le plan antéro postérieur, il faut avant tout rechercher un bon
enfouissement de la cupule. Compte tenu de la bonne stabilité intrinsèque du système, il ne faut pas rechercher une antéversion
‘systématique’, mais plutôt s’adapter à la morphologie du cotyle osseux. Il faut privilégier le bord postérieur et inférieur. Il existe parfois malgré tout un léger débord antérieur. Celui ci
pourra être responsable de conflit douloureux avec le tendon du psoas, comme d’ailleurs avec n’importe quelle cupule press fit à métal back.
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La cupule d’essai, montée sur le porte cupule d’essai permet de s’assurer de la qualité du fraisage et de la stabilité que l’on pourra obtenir.
Si manifestement le fraisage s’est fait dans un os dur et de bonne qualité, il peut être intéressant de faire l’essai d’abord avec la taille inférieure. En cas de mauvaise stabilité de
l’implant d’essai :
- Le fraisage peut être insuffisant, n’ayant pas dépassé la zone d’os élastique, et un bref complément de fraisage à la même taille
permet de trouver la zone de stabilité.
- il faudra aussi s’assurer que l’implant n’est pas resté suspendu sur les bords du cotyle. Si c’est le cas, après avoir bien
vérifié que le bourrelet a été totalement excisé, on fraisera l’entré du cotyle avec une fraise de diamètre supérieur.
- Si la cupule d’essai est correctement enfoncée, on a la possibilité, si le capital osseux le permet , en particulier au niveau
des cornes et de l’arrière fond, de fraiser au diamètre supérieur. Mais encore une fois, il faut veiller à ne pas céder à la tentation de l’escalade et ne pas hésiter à s’orienter vers un
cotyle 3 points.
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La mise en place de l’implant
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Implant press fit. L’utilisation du préhenseur permet de positionner l’implant
et de l’orienter. Si l’exposition insuffisante ne permet pas de s’assurer de l’absence d’interposition, il est alors préférable de la mettre en place manuellement , orientée vers l’avant,
puis de la faire pivoter progressivement en prenant garde, dans tous les cas, de ne pas l’impacter avant de s’être assuré de sa bonne
orientation. La correction de l’orientation peut être obtenue en frappant le bord de la cupule à l’aide de l’impacteur prévu à cet effet.
Une fois l’orientation satisfaisante, l’impaction définitive est obtenue en impactant au fond de la cupule à l’aide de l’impacteur.
A ce stade, l’implant doit être stable correctement positionné par rapport au cotyle osseux, sans débord métallique antérieur ni
postérieur, mais pas verticalisé. Encore une fois, il n’est pas nécessaire de rechercher une antéversion théorique. C’est alors que l’on
peut compléter, si nécessaire, la résection des ostéophytes du pourtour du cotyle.
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Implant trois points Selon l’état du toit du cotyle osseux, il est en général souhaitable de
cintrer légèrement la patte pour qu’elle s’adapte à la surface osseuse. Si l’encombrement de la patte ne permet pas l’utilisation du
préhenseur, il faut introduire la cupule verticalement, l’impacter doucement au fond puis la faire pivoter vers la verticale, mais sans rechercher le contact de la patte avec le bord
supérieur du cotyle osseux, ce d’autant qu’il existe une dysplasie. L’orientation du cotyle sur la verticale peut être vérifié à l’aide de l’impacteur orienteur. Il est préférable
d’exagérer de quelques degrés l’horizontalisation. Là encore, l’orientation antéro postérieure doit se faire en fonction du cotyle osseux. La patte doit être positionnée à 11heures pour une
hanche droite et à 1 heure pour une hanche gauche
Une fois l’orientation définitive obtenue, même si la stabilité n’est pas
parfaitement satisfaisante, commence la mise en place du ‘tabouret à trois pieds’ cher à Gilles BOUSQUET. Le premier point d’ancrage est le pion antérieur parce qu’il est dans l’axe de la
voie d’abord. On réalise un avant trou à l’aide du perforateur, plutôt qu’à la mèche. Puis on met en place le pion à l’aide du porte pion et on l’impacte à l’aide de l’impacteur droit.
Avant l’impaction définitive on met en place le pion postérieur, selon la même technique. Puis on impacte les deux pions jusqu’à les mettre en infrastructure par rapport à la surface intra
articulaire de la cupule métallique.
La vis supérieure est ensuite mise en place. Le forage à la mèche doit être prudent, et l’orientation de la vis doit se faire vers le haut et vers l’avant, aussi oblique que le permet
l’aile iliaque. Il est parfois utile de modifier l’orientation de la mèche, une fois traversée la corticale. Il faut absolument éviter tout contact avec la cupule métallique, ce qui serait
une cause rapide d’échec. Le serrage de la vis va permettre une compression de la cupule contre le cotyle osseux et souvent la fera basculer de quelques degrés vers la verticale, d’où la
nécessité de garder une réserve lors de la mise en place.
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Mise en place de la tige.
- Si on utilise une tige monobloc (type Charnley par exemple) il est préférable d’impacter l’insert sur la tige avant mise en place
de la tige, à l’aide de la presse à insert dépourvue de sa platine. L’impaction peut être réalisée après scellement de la tige, mais il faut impérativement que le ciment soit parfaitement
sec, et ce geste n’est pas toujours très aisé.
- Dans le cas d’une tête modulaire, l’impaction de l’insert se fait sur la table d’instrument, à l’aide de la presse à insert
montée sur sa platine.
- Le choix de la taille de la tête. Dans la mesure où on a choisi comme dit plus haut, une tige dont le col est du diamètre le plus
réduit possible, le diamètre de la tête est essentiellement fonction de la taille de l’insert polyéthylène, selon deux règles : d’abord,
avoir une épaisseur suffisante de polyéthylène, donc taille 22 pour les petites tailles (jusqu’à 52 ), ensuite éloigner le plus possible le col
d’un contact avec le polyéthylène, donc optimiser la mobilité dans l’articulation centrale, soit une taille 28 au delà de 52. Si le col a un diamètre plus important, il faut utiliser au plus
tôt une taille 28 (à partir de 50)
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Réduction
Cette étape et importante car elle conditionne la mobilité dans l’articulation
périphérique dont il faut rappeler l’importance pour le fonctionnement à long terme de la prothèse.
Il faut nettoyer soigneusement le fond
de la cupule, qui aura été protégé par une compresse lors du temps fémoral. S’assurer de l’absence de fragment osseux, de partie molle et bien sûr de ciment. Lors de la manœuvre de réduction il
faut éviter une interposition d’un lambeau de capsule postérieure.
Une fois la cupule réduite, il faut impérativement vérifier la mobilité
de la cupule polyéthylène dans la cupule métallique et ne pas hésiter à reluxer pour renettoyer le fond de la cupule si cette mobilité n’est pas satisfaisante.
INDICATIONS
- Toutes les indications classiques de prothèse de hanche.
- Avant tout toute indication de prothèse ou il existe un risque de luxation
- en particulier les révisions
- en particulier les luxations récidivantes sur PTH
- Chez le sujet jeune avec une bonne musculature et une activité assez intense, il faudra probablement une prothèse à couple de
friction moderne
CONCLUSION
Si on respecte les conditions d’implantation, cette prothèse permet d’obtenir de très bons résultats fonctionnels, en particulier l’absence de luxation, et dans son concept doit permettre de
limiter l’usure du polyéthylène et donc d’assurer une survie satisfaisante à long terme.